mercredi 14 décembre 2011

Mesure de l'impact extra-financier d'un social business


Un social business, tel qu'il est défini, doit prendre en considération l'impact social et environnemental mais encore faudrait-il pouvoir le mesurer et disposer d'indicateurs permettant de le quantifier. La notation extra-financière de la structure doit être au moins aussi importante que ses bénéfices. L'entreprise peut bien entendu communiquer sur son impact social et environnemental mais cela ne peut s'arrêter à une simple démarche RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises).

Les agences de notation extra-financière, dont l'activité principale est de fournir une évaluation des sociétés portant sur leurs performances en matière de RSE, d'engagement social et environnemental, renseignent les investisseurs sur ces critères. Cependant, ces agences et leurs notations n'auraient en réalité que peu d'impact sur la décision des investisseurs et ne serait ni plus ni moins qu'un "outil de communication".



Un social business serait en concurrence avec une entreprise "normale", cependant le fait que celui-ci produise un bienfait social ou environnemental devrait être un atout indéniable voire un avantage concurrentiel car il est l'essence même du projet social business. Il est impensable d'évaluer un social business seulement par rapport à son retour économique.

Certains ont déjà travaillé sur la quantification de l'impact extra-financier et il existe des outils pour mesurer l'impact social d'une action tel que le "Social Return On Investment" (SROI). Il s'agit de "valoriser en termes monétaires le rapport entre les budgets consacrés à l'aspect social d'une action et les apports sociaux qu'elle a générés sur le territoire ou elle a été mise en place".

mercredi 30 novembre 2011

Cas d'école - la Grameen Danone Foods Limited

C'est en Octobre 2005 à Deauville que le PDG de Danone, Franck Riboud, et le fondateur de la Grameen Bank, Muhammad Yunus, se rencontrent. Après un échange sur les solutions innovantes et progressistes que Danone pourrait proposer afin de lutter contre la malnutrition au Bangladesh, ils décident alors de créer une joint venture: la Grameen Danone. Le professeur Yunus précise d'emblée que cette entreprise fonctionnera comme un social business dont la mission principale sera d'éradiquer la pauvreté.
Au Bangladesh, un enfant sur deux souffre de malnutrition avec en particulier « des carences en micronutriments qui grèvent les possibilités de développement physique et mental ».

4 objectifs sont fixés à Grameen Danone Foods Limited (GDFL) :
- Développer un produit avec une forte valeur ajoutée nutritionnelle, accessible aux plus pauvres. Le yaourt « Shokti Doi » (« celui qui rend plus fort » en Bengali) a été conçu en fonction des besoins nutritionnels des enfants bangladais avec l'aide des nutritionnistes de l'ONG « Gain », ce yaourt est composé de calcium, renforcé en zinc, fer, iode, vitamine A et vendu 6 Taka, l'équivalent de 6 centimes d'euros
- Améliorer les conditions de vie de la communauté par la création d'emplois qui permettent l'augmentation du niveau de vie, puis l'enrichissement du tissu social et du territoire
- Protéger l'environnement et économiser les ressources
- Assurer une activité durable, en tant que social business, la GDFL doit parvenir à assurer sa pérennité, 99% des profits sont réinvestis pour assurer son développement et sa perennité



Après de longues années d'étude-terrain, Muhammad Yunus réussit à familiariser les femmes avec les méthodes et l'intérêt du microcrédit, aujourd'hui 95% des emprunteurs sont des femmes. Celles-ci participent de plus en plus à l'activité économique. Les profits dégagés par ces micro-entrepreneuses étaient significatifs et profitaient davantage à la famille et au village. M. Yunus est persuadé qu'il est préférable de prêter de l'argent à des femmes qu'à des hommes car la femme investit davantage l'argent gagné pour le bien-être de sa famille, l'éducation des enfants, les dépenses de santé etc. Ces micro-entrepreneuses  sont appelées les « Grameen Ladies ».

Danone a décidé de reprendre le concept des Grameen Ladies. Cependant, au lancement des ventes, il y a eu un fort roulement de personnels mais grâce aux conseils d'ONG locales GDFL a réussit à fidéliser les « Grameen Ladies » en leur déterminant une zone de vente précise non loin de chez elles et en leur assurant une formation. Elles sont rémunérées à la commission en effectuant du porte-à-porte. Le principe de ces projets est également de développer une activité locale et de lutter contre l'exode rural. Ce réseau fonctionne sur la proximité. La GDFL réfléchit sur la façon de développer au maximum l'activité économique sur place.

La GDFL a su être acteur dans la vie économique de Bogra en créant des emplois. Elle commence aussi à jouer un rôle dans la lutte pour l'émancipation des femmes au Bangladesh (voulu par M. Yunus).

Danone a su adapter la production, l'usine, installée à Bogra (250 km au nord de la capitale), est 50 à 100 fois plus petite que les standards habituels du Groupe. L'objectif étant de parvenir à toucher 3 millions de consommateur potentiels. Grâce à une enzyme appelée "stabilac", permettant de bloquer le développement bactérien dans le lait pendant plusieurs heures, la GDFL peut s'approvisionner auprès des paysans isolés qui apportent leur lait à la coopérative situé à 80 km de l'usine (la GDFL prévoit de regrouper 6000 paysans dans un an).
Par ailleurs, Le site est équipé d'un biodigesteur, qui produit du méthane permettant de fournir l'énergie au villageois alentours, d'une station d'épuration et de chauffe-eau solaire permettant d'obtenir de l'eau chaude. Toutes les installations fonctionnent au gaz et énergies moins polluantes que l'électricité, peu présente au Bangladesh. De plus, Pendant les périodes de mousson, elle met en place d’énormes réservoirs souterrains pour récupérer l’eau des toits de l’usine.

Enfin, la GDLF a su adapter la structure de financement. Danone a mis en place un fonds novateur et spécialement dédié à ses actionnaires: le fonds "danone.communities". Ce fonds prend la forme d’une SICAV (Société d’Investissement à Capital Variable) gérée par le Crédit Agricole. Les actionnaires du Groupe ont ainsi la possibilité d’investir leurs dividendes dans des projets d’entreprise à vocation sociale financés par ce fonds au lieu de les toucher en numéraire.
« La SICAV danone.communities a vocation à investir, à hauteur de 90 % minimum dans des instruments de taux, OPCVM (Organismes de Placement Collectifs en Valeurs Mobilières) monétaires et obligataires, dans la mesure du possible gérés selon une approche ISR (Investissement Socialement Responsable) et à hauteur de 10 % maximum, dans des entreprises dont le premier objectif est le développement sociétal, via le FCPR (Fond Commun de Placement à Risque) danone.communities". Ce dernier, a pour vocation d'investir dans des entreprises qui ont un projet à fort impact social et qui reste en cohérence avec l'objectif du Groupe Danone: "apporter la santé par l'alimentation au plus grand nombre".

jeudi 17 novembre 2011

Le Sommet du social business 2011


Ce sommet a eu lieu du 9 au 12 Novembre 2011 à Vienne en Autriche, c'est le 3e du genre. L'objectif était clair; motiver les jeunes, universitaires, entrepreneurs et multinationales à       travers le monde à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement d'ici à 2015 (initiative lancée par l'ONU).

Les participants venaient de toutes parts et tout secteurs confondus, certains intervenants étaient au rendez-vous pour représenter leurs entreprises (Danone, Veolia, BASF ou Adidas). La communication était bien réglée; des multinationales et de prestigieuses universités (Harvard, HEC, Glasgow, Bocconi) ont répondu à l'invitation sans compter la présence de Ban Ki-moon le secrétaire Général des Nations Unis ainsi que du chancelier Viennois Werner Faymann. Bien que le concept soit récent et que peu de ces grandes entreprises n'aient mis en place un social business encore abouti, le Pr Yunus a su jouer de son carnet d'adresse et de son influence pour promouvoir ce nouveau modèle économique.

Depuis quelques années certaines universités et grandes écoles de commerce lancent des programmes pour l'initiative sociale telle que l'Université de Stanford (Center for Social Innovation) ou Harvard (Social Enterprise Initiative) aux Etats-Unis. En France, l'ESSEC a lancé sa chaire Entrepreneuriat Social suivie quelques années plus tard par HEC qui a créée sa chaire Social Business, Entreprise et Pauvreté co-présidée par Muhammad Yunus.

Ces initiatives des grandes universités seront très certainement suivies par d'autres en France et ailleurs. Multinationales ou PME pourraient, d'ici quelques années, lancer des initiatives social business, ces pionniers ont une responsabilité car de leurs succès pourraient dépendre l'avenir du social business. Par ailleurs, l'importance de l'implication du top management à l'image de Danone avec Franck Riboud, Veolia Environnement avec Antoine frérot ou encore BASF avec John Davies (lui-même vice-président d'Intel) est également indispensable à la réussite et à la promotion du social business. 

mardi 8 novembre 2011

Social business et philanthropie

Aujourd'hui, le mouvement philanthropique américain compte 900 milliards de dollars soit 8% du PIB. La fondation Bill et Melinda Gates comptent environ 30 milliards de dollars d'actifs investis dans des programmes philanthropiques de part et d'autre du globe.

Le principe de "non loss, non dividend" font alors des actionnaires ou investisseurs d'un social business des philanthropes. Peut-on alors considérer ce genre d'actionnariat comme philanthropique ? Un simple investissement serait socialement responsable, terme déjà bien connu. Un social business peut aussi être financé sous forme de dons si l'investisseur le spécifie explicitement.

Un social business fonctionne comme une simple entreprise; lancer son activité et créer de la richesse, mais pour cela elle a besoin d'apports extérieurs. Les actionnaires ou investisseurs souhaitant investir leur argent dans la structure le récupèreront si l'entreprise est pérenne et rentable mais ils ne toucheront pas de dividendes. Un social business appartient aux salariés, ils élaborent eux-mêmes leurs stratégies et ne reçoivent en conséquence aucune pression d'actionnaires dont la motivation est bien trop souvent la rentabilité immédiate et une vision court-terme.

Philanthrope, altruiste, donateur ou investisseur, peu importe l'étiquette, chacun peut apporter sa pierre à l'édifice.

lundi 31 octobre 2011

Le social business et l'entrepreneuriat social

Il existe un vaste nombre d'expressions pour désigner les entreprises dont le cœur de l'activité est la vocation sociale. Bien que certaines notions soient proches je tiens à éclaircir le concept du social business en le différenciant avec celui de l'entrepreneuriat social.

Un social business n'est pas de l'entrepreneuriat social. Bien que l'objectif entre les deux semble le même, il n'en est rien. En effet, dans les deux cas les créateurs d'entreprise apportent des solutions innovantes et concrètes dans le but de concilier l'approche économique avec des objectifs sociaux. Cependant un social business est un type de structure bien spécifique - pas de perte, ni de dividende avec un objectif a visée social. Le professeur Yunus insiste bien sur le fait que la structure d'un social business est unique ce qui le rend bien distinct.



lundi 17 octobre 2011

Quelles différences entre l'aide publique au développement & autres programmes philanthropiques, et le social-business ?

Le social business n‟a pas pour objectif de se substituer à l‟aide publique au développement ou de remédier à certaines de ses carences via des programmes philanthropiques mais bien de développer des mécanismes susceptibles de favoriser le développement économique et la lutte contre la pauvreté. En effet, le social business rompt avec les principes fondamentaux du capitalisme en affirmant qu‟il ne faut pas reverser de dividendes.


M. Yunus propose une alternative au système actuel du tout-profit et ainsi en quelque sorte renouveler le capitalisme, en rendant à l‟Homme sa place centrale.


Mais, dans le cadre de l‟émergence de discours sur le développement du capitalisme global centré sur l‟éthique (le philanthrocapitalisme), les social-business ont pour objectif d'éviter non seulement les dérives du capitalisme financier, mais également les formes moins performantes de l‟action sociale y compris la solidarité internationale, notamment caritative.


Un schéma de comparaison pour expliquer les différences avec une entreprise "classique" et des organisations type ONG





                                                                            

mercredi 28 septembre 2011

Introduction au social business



« Un social business est une société dans laquelle les profits réalisés restent au sein de l’entreprise afin de financer son expansion, de créer de nouveaux produits ou services et de faire davantage de bien dans le monde. »  Muhammad Yunus

Muhammad Yunus, économiste bangladais et Prix Nobel de la Paix en 2006, est le premier entrepreneur social qui a permis de faire émerger ce courant de pensée. En 1976, il met en place un programme de microcrédit pour les plus pauvres en créant la Grameen Bank (« banque du village » en bengali). Le but est de proposer des crédits très faibles à des populations très pauvres afin de les aider dans leur développement, et ce, sans garantie. 

Depuis maintenant plus de 15 ans, la Grameen Bank n’a toujours pas eu recours à des dons, réalise des profits et a distribué 6 milliards de dollars à près de 150 millions de personnes.

Muhammad Yunus a souhaité aller plus loin et a crée ce nouveau concept ; le social business qui aurait pour objectif de concilier marché, profit et les trois piliers du développement durable (économique, social et écologique) adapté aux pays pauvres et émergents. Un nouveau modèle économique dont l'entreprise, qui au lieu d‟avoir comme seule source de motivation la maximisation du profit, aurait l'envie de réfléchir à l'impact sociétale et environnementale de son action dans l'environnement dans lequel elle évolue.